Estive d’Arréou : témoignage d’un éleveur présent sur l’estive depuis les années 1980


Je suis monté la première fois, j’avais 16 ans et j’ai appris la montagne avec Laurent de Latte, il est mort à présent. Avant l’ours tout se passait mieux, l’entente régnait entre tous, les bêtes redescendaient impeccables. Il n’y avait pas tout ce gaspillage d’argent et de bien meilleurs résultats pour tous : éleveurs, bétail, touristes, tout le monde y trouvait son compte.

 

Je suis parfaitement d’accord avec ce qu’a exprimé Gérard Pujol notre berger.

 

Il me revient en mémoire ce que nous avons vécu en 2014 sur l’estive.

 

Une fin d’après midi de mauvais temps, Gérard constate qu’il venait de subir une attaque. Autour des cadavres il trouve 9 crottes d’ours, plus, bien sûr, des traces de pas. Il y avait ce jour là beaucoup de brouillard, je crois même qu’il pleuvait.

 

Aussitôt, il alerte les Autorités compétentes. Avec le mauvais temps ; le début de nuit s’annonçant, il lui était impossible de rassembler le troupeau et de mesurer l’ampleur des dégâts, il décide de rentrer à la cabane. Mais, à la cabane, comme dans bien d’autres endroits de nos montagnes le téléphone ne passe pas.

 

Il s’apprêtait à prendre son repas du soir lorsqu’il entend frapper à la porte.

 

Deux gardes ONCFS sont là.

 

Ils informent Gérard qu’une bergère d’appui, venant de Pau, a été dépêchée sur l’estive. « Elle doit arriver d’un instant à l’autre et nous devons la surveiller durant la nuit », indiquent-ils à Gérard éberlué.

 

Que venait faire une bergère d’appui, en début de nuit, sous la pluie et le brouillard alors que le troupeau effarouché par l’attaque se trouvait …..?

Se rendant sur les lieux du sinistre accompagnés de leur chien, les gardes ne peuvent que constater les dégâts. Le chien lui ne trouve rien, normal, les odeurs avaient été effacées par la pluie.

 

Retour à la cabane, la bergère arrive.

 

En montagne, ceux qui nous connaissent le savent bien, nous avons le sens de l’hospitalité et du respect de la personne humaine.

 

Gérard Pujol réagit très bien, il propose à la bergère de rester à la cabane à la fois pour se restaurer et pour dormir. Que serait elle allée faire sous sa tente en pleine nuit sans brebis autour ?

 

Après maintes discussions, autorisation des autorités, la décision est prise, la bergère dormira à la cabane d’Arréou ce qui évitera aux deux Gardes de monter une garde bien ridicule autour de la tente. Ils peuvent redescendre dans leurs foyers.

 

Ironie du sort, ridicule de la situation, le lendemain matin, que constatent la bergère et Gérard… une brebis avait été attaquée dans la nuit à moins de 100m de la cabane.

 

De telles situations que nous vivons régulièrement depuis que l’ours est là me révoltent. Combien tout cela coûte-t-il a notre Société, n’y a t’il pas mieux à faire ?

 

Et puis il faudrait pouvoir se défendre, être armé. La bergère d’appui n’avait qu’une trompette soi-disant pour effrayer l’ours. Les gardes de l’ONCFS qui sont montés pour la protéger étaient armés jusqu’aux dents. Pourquoi pas nous ? C’est bien la preuve que l’ours est dangereux.



Mai 2016